Culture
Portrait de femme qui a marqué Paris : Madame de Sévigné
Cette semaine, Vivre Paris vous dresse le portrait d’une figure littéraire incontournable de la capitale : la maquise de Sévigné.
Nous sommes le à Paris. Dans le 4ème arrondissement, Marie de Rabutin-Chantal vient de naître. Fille du baron et de la baronne de Chantal, elle voit le jour à l’hôtel Coulanges, la maison ses grands-parents maternels, sur la place des Vosges. La petite grandit dans cette somptueuse demeure jusqu’à ses 11 ans.
Le lendemain de sa naissance, elle est baptisée à l’église Saint-Paul dans le Marais. Orpheline très tôt, elle est élevée par ses grands-parents. Au décès de son grand-père, elle va vivre chez l’aîné de ses oncles maternels : Philippe II de Coulanges. Elle étude les langues, les « belles lettres » et lit beaucoup.
Le , Marie a 18 ans. Elle épouse un noble breton : Henri de Sévigné, 21 ans, à l’église Saint-Gervais Saint-Protais (75004). Si le mariage est arrangé, les deux jeunes semblent se satisfaire l’un l’autre. Elle est curieuse et romantique, lui dépensier et fougueux. Henri fait de Marie la Marquise de Sévigné et ensemble ils mènent la grande vie, se montrent dans les salons et y font sensation !
La jeune et sublime Marquise devient de ces femmes à la mode dont la noblesse parisienne recherche la compagnie.
Si elle réside aux Rochers, la propriété bretonne de son mari, Marie de Sévigné se rend souvent à Paris pour retrouver son cercle d’illustres ami(e)s de la société de l’hôtel de Rambouillet, parmi lesquel(le)s : Madame de La Fayette, La Rochefoucauld, ou encore Fouquet. Lorsqu’elle n’est pas à la capitale, elle correspond beaucoup avec son entourage.
(né en 1648) la marquise décide d’imposer la chasteté à son mari. Leur idylle a fané il y a longtemps, quand son époux a décidé de lancer la rumeur de sa frigidité. Celui-ci va voir ailleurs et tout Paris le sait. C’est d’ailleurs pour la beauté des yeux de sa maîtresse Charlotte de Gondran, dite « La belle Lolo » qu’Henri de Sévigné meurt en duel, en 1651.
Veuve (et riche) à vingt-cinq ans, Marie décide de déménager à Paris, rue Saint-Avoye (l’actuelle rue du Temple, 75003).
Elle refuse de se remarier et se consacre à sa vie mondaine et religieuse (elle se rend régulièrement à Saint-Louis, ancienne église des jésuites, pour assister avec ferveur aux sermons du célèbre Bourdaloue).
Mais la seule vraie passion de la marquise, c’est Françoise. Sa place actuelle dans la littérature française, elle la doit justement à sa fille, dont elle est éperdument attachée. Mais cette dernière vit mal d’être dans l’ombre de cette mère qui adore se montrer.
Quand Françoise déménage, en 1671, à Grignan (Auvergne-Rhône-Alpes) pour rejoindre son mari, un lieutenant général, la marquise supporte très mal cette séparation. C’est d’ailleurs un tel choc émotionnel que Marie se met à souffrir d’algodystrophie (douleurs articules qui découlent d’un traumatisme).
Malade de chagrin, elle commence alors une correspondance avec sa fille. Celle-ci durera un quart de siècle et traitera majoritairement des potins de la cour royale. Les lettres seront aussi un moyen pour madame de Sévigné de montrer encore et toujours son amour dévorant à sa fille chérie.
Scandales, politiques, événements mondains, mariages… La marquise dépeint avec exactitude et talent la vie parisienne du 17 ème siècle dans quelques 1 500 lettres. Bien qu’aucune d’elles n’était destinée à être rendue publique, les lettres furent conservées par la famille de la marquises et publiées clandestinement au 18 ème siècle.
La petite fille de Marie de Sévigné, Pauline de Grignan, marquise de Simiane décide finalement de confier leur publication officielle à un éditeur d’Aix-en-Provence, Denis-Marius Perrin. Sauf qu’avant cela, elle modifia certaines lettres et fit disparaître tous les écrits de sa mère Françoise. Ne reste donc que les discours (devenu monologue) de la marquise.
On raconte que si l’on avait pu lire l’intégralité de la correspondance, bien des mystères de l’époque du Roi Soleil aurait été percé. Notamment l’identité du fameux Masque de Fer, qui se serait trouvée écrite noire sur blanc dans une des lettres de Françoise de Sévigné à sa mère.
Dans ces lettres adressées à sa fille, Madame de Sévigné se libère des règles d’écriture de l’époque. Elle raconte elle-même : « C’est une chose plaisante à observer que le plaisir qu’on prend à parler, quoique de loin, à une personne que l’on aime, et l’étrange pesanteur qu’on trouve à écrire aux autres. » En décrivant ainsi son époque à sa fille et à ses ami(e)s, madame de Sévigné est devenue une des plus grandes épistolières de toute la littérature française.
Aux environs de 1677 la marquise emménage dans l’hôtel Carnavalet au 23 rue du Val (actuelle rue de Sévigné). Elle y vit jusqu’à sa mort (de la grippe) en 1696.
L’actuelle salle des Estampes de l’hôtel, devenu en 1866 le musée municipal de la ville de Paris consacré à l’histoire de la capitale, témoignage du passage de la Marquise entre ces murs.
Quant à Madame de Sévigné, elle est enterrée au château de Grignan. En 1793 au moment de la Terreur, sa tombe est pillée (pour le plomb). Ironiquement, le crâne de celle qui n’avait jamais quitté le quartier du Marais fut renvoyée à Paris pour être étudiée…
C.B